Pardon. De ma vie. De celle de Beccassine, de ses 45545164 frères et de ses 5443324 sœurs. En gros. En réalité, Dodo n’a que 3 sœurs et 5 frères, mais ça m’a toujours paru surdimensionné, moi qui suis fils unique. Pardon. Je manque à mon devoir. Je suis Yoann, le compagnon de Becco. Nous nous sommes rencontrés il y a 5 ans de ça et, depuis, je ne crois pas que nous nous soyons déjà lâché une seule fois. Façon de parler, je ne suis pas trapéziste, je suis écrivain et poète. J’y ai cru, savez-vous, que l’histoire était écrite à l’avance, que d’aucun ne pourra rien changer à l’avenir. Mais non. C’est faux. Il ne s’agit que de hasard, de chance, de malchance et de tours du destin, pas d’écriture.

Nous nous sommes croisés pour la première fois à San José, alors qu’elle tentait de se faire embaucher dans un cirque tandis que j’essayais de trouver l’inspiration. Depuis… Nous sommes les amants du monde entier. C’est curieux, savez-vous, cette histoire. Il y eu tout, il n’y eu rien, la chaleur et le froid ont fait de nous leurs esclave. C’est curieux, savez-vous, cette histoire. Nous avons flâné, dansé, chanté et pleuré au clair de lune, quand la terre tout entière s’abandonnait au désespoir. C’est curieux, savez-vous, cette histoire.

L’amour, toujours, l’amour, c’est ce qui nous a transportés. Connaissez-vous ce doux sentiment qui vous transporte de nuage en nuage ? Nous, oui. Nous, puisque nous sommes un. Je n’expliquerais pas cette fusion élémentaire qui s’est produite entre nous, nous obligeant à nous supporter l’un autre tant qu’à nous aider. Saloperie. Autant se le dire, nous avons adopté un mode de vie aléatoire, parfois violent, parfois doux, parfois sulfureux. Le dernier des cas est mon favori. Mais le premier n’est pas mal. Non, je n’ai jamais levée la main sur elle et je ne risque pas de le faire, mais les colères éclatantes de notre foyer ont déjà cassées des vitres. Mais cela se termine toujours bien. On s’aime.

Becco est née à David au Panama, entourée, déjà, d’une sœur et de 4 frères, ainsi que d’un faux jumeau. Elle a bien grandit et n’a pas eu de grands problèmes familiaux, si ce n’est le décès de sa pauvre mère. Une femme bien, de ce que je sais d’elle. Mais Dodo a toujours tenu à rester discrète sur ce sujet, je ne lui en demande pas d’avantage. Elle vient d’une famille relativement aisée, un bon point, car ça ne fait ni d’elle une enfant gâtée, ni une enfant dans le besoin. C’est bien, je trouve. Lorsque nous avons commencé à nous fréquenter, tandis que je vagabondais dans les rues, elle trouvait déjà des places dans des cirques avec son frère. Tous deux ont toujours été très proches, et très doués pour le trapèze, c’en est bluffant ! Ils font carrière ensemble, en toute logique. Il y a quatre ans de ça, nous avons bougé de notre trou pour rejoindre l’Amérique. Et puis ils ont trouvé un cirque. Un bon cirque, qu’ils disaient, un cirque artistique comme pas deux, une ère de jeux sans limite, des trapèzes à perte de vue. Ils parlaient d’une nouvelle ville, populaire, qui accueillait n’importe qui. Plein de célébrités, ont-ils précisé. Ils disaient que je pourrais en faire partie, mais bon. Elle veut voir une certaine chanteuse, un danseur et d’autres, tandis que je rêve de croiser un certain mannequin, encore une fois. Nous y sommes arrivés. Nous les avons vus, adoptés, tous autant qu’ils sont.

Désormais, Becco et moi vivons bien. Nous avons même un appartement, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Nous pensons à adopter. Un chien. Un koala, et peut-être, sait-on jamais, un morveux.